Commentaire
Morton Feldman (1926-1987) occupe une situation très singulière dans la création musicale contemporaine américaine. Délibérément à l'écart des modes et des systèmes d'écriture développés à partir des années 1950, il se fraye un chemin qui le conduit à sonder toujours plus en profondeur la dimension contemplative de l'écoute et à appréhender la fluidité temporelle inhérente au phénomène musical. Publier les écrits d'un compositeur tel que Feldman relève d'une gageure à laquelle nous avons adhéré avec bonheur. Il nous a semblé nécessaire de publier des textes qui représentent non seulement un lieu de confrontations notamment entre la musique et les arts plastiques, mais aussi une forme de soliloque où l'on perçoit des préoccupations que plusieurs générations d'artistes ont partagées. Ainsi, ce musicien solitaire et paradigmatique aura-t-il répandu autour de lui ce que l'on pourrait appeler une éthique personnelle : la conviction qu'en art en général, et en musique en particulier, chaque projet, chaque initiative est à creuser, à la condition de mettre en œuvre une exigence sans compromis idéologique.