Commentaire
Tout est à faire, tout est à créer, même trouver un mot en chinois pour traduire le mot « punk ». Punk devient « pengke » avec des caractères qui font écho à l’esprit du mouvement puisque le premier signifie « amitié » et le second « surmonter ». Si le mot en anglais évoque les hooligans, en chinois il sublime l’amitié. De ces influences occidentales naissent un mouvement et un style de musique au message politique orienté vers une incontestable volonté d’individualisme. Pour être un punk en Chine au milieu des années quatre-vingt-dix, il faut répondre à un état d’esprit et être assurément contre la politique en vigueur. Il faut avoir un message à colporter et accepter de prendre des risques pour l’exprimer.
Depuis l’ouverture de la Chine en 1978, les musiques alternatives connaissent un essor fulgurant à l’image de l’évolution du pays. À Pékin, la scène indépendante fédère un nombre croissant de groupes, labels, disquaires et clubs, autour d’une même veine contre-culturelle qui transcende les obédiences musicales traditionnelles. Depuis les années quatre-vingt-dix, des communautés de musiciens qui veulent s’éloigner de la musique pop préfabriquée par l’État, explorent le rock occidental, s’en inspirent et utilisent les musiques amplifiées comme exutoire. Textes politiques ou chroniques du quotidien, les artistes lui donnent plusieurs formes mais connaissent les limites à ne pas franchir pour ne pas alarmer le Parti. En quarante ans, la Chine a vu grandir les héritiers de la Révolution culturelle, la génération de l’enfant unique et celle d’Internet et de la surconsommation: d’acte de rébellion, le rock est devenu mode de vie et, en dépit des chocs générationnels, représente un désir commun d’empowerment.