Commentaire
Mon livre précédent (Hommes et problèmes du jazz) était le produit d'une réflexion sur les problèmes généraux du jazz ; un livre analytique ; un regard qui eût eu quelque sérénité si l'auteur n'avait été engagé, d'une certaine manière, dans les combats esthétiques de l'époque. Jazzistiques (TowardJazz) ne se tient pas absolument à l'écart de toute polémique ; mais celle-ci a changé d'essence. Ce qui importe désormais, semble-t-il, c'est d'abord une mise en question de l'homme de jazz, considéré dans sa gloire et ses petitesses. Les plus grands artistes du jazz ont quelquefois, devant le public, une attitude qu'eussent condamnée avec hauteur un Beethoven, un Van Gogh, un Kafka. Nul n'a encore exprimé avec force ce comportement ; et ce n'est pas à l'outsider que je suis : ni membre de la communauté des jazzmen, ni étranger à elle, qu'il appartient d'exposer et de défendre une éthique qu'il ne saurait adopter. Que puis-je, sinon faire entendre l'écho d'une révolte, un cri d'alarme ? Aussi, Jazzistiques est-il, beaucoup plus que mes précédents livres, un reflet de mes propres préoccupations. Pour cette raison, peut-être, les débats y tiennent moins de place que l'affirmation d'une ligne de pensée. Je ne vise plus, comme jadis, à l'objectivité ; je m'efforce de définir, face au phénomène jazzistique, une position personnelle.