Commentaire
Rosa Bordas fut vers 1870 « la Rachel de la chanson », notamment avec La Marseillaise (alors séditieuse) et La Canaille. Sa voix superbe, son attachement aux traditions populaires provençales, ont été admirés par les Félibres. Arrivée à Paris au sommet de sa popularité, elle prit parti pour la République, puis sous la Commune elle chanta dans les Tuileries ouvertes au peuple.
Mistral lui consacre quatre pages de ses souvenirs, vibrantes, mais conclues par un éloge quasi funèbre : « Pauvre petite Montilienne ! Personne n'en a plus entendu parler ». Comment s'expliquer, dans un corpus assez abondant de monographies locales sur cette vedette, le silence presque complet qui couvre toute la deuxième moitié de sa vie, la pression policière, la censure impitoyable, la mise au pilori dans la presse ? L'ouvrage étudie la construction d'une mémoire socialement admise, avec les réinterprétations et les « oublis » d'une classe.