Commentaire
Mais qui est donc Alkan ?
Au cœur du siècie romantique, d'abord un pianiste et un compo¬siteur visité par le génie, provoquant l'admiration de Liszt et de Chopin. Le Tout-Paris mondain s'arrache ses leçons de piano et acclame ses rares et fulgurantes apparitions de concertiste.
Mais cet artiste à succès est aussi un solitaire. Comme son ami Chopin, c'est surtout au piano qu'il va se confier dans l'intimité, régnant en maître absolu sur un instrument dont il tire des pages hardies et d'une virtuosité diabolique, véritable défi aux mains et à la mémoire des interprètes.
Figure ô combien énigmatique, on le surnomme de son vivant "le Berlioz du piano". Il ose de prophétiques trouvailles sur les rythmes et les timbres, mais se passionne également pour J.-S. Bach qu'il fait découvrir aux Parisiens. Ce paradoxe vivant obéit au cycle de ses humeurs, et sa vie est une valse-hésitation entre misanthropie et désir de rayonner.
Mystique, il rêve de mettre en musique la Bible qu'il traduit sans relâche. La légende ajoute même qu'il serait mort écrasé par sa bibliothèque en allant y prendre le Talmud. Il rejoint ainsi le cercle de ces artistes maudits, punis pour excès de génie, que notre siècle replace enfin auprès de leurs pairs.
C'est donc cette figure Janus, cette personnalité hors du commun que tentent ici de cerner spécialistes et interprètes d'une musique et d'une époque que l'on n'aura jamais fini d'aimer : il fallait lui rendre l'un de ses enfants les plus fascinants.