Commentaire
Les danseurs jouent au XXe siècle un rôle privilégié dans le monde des arts. Les temps ont bien changé depuis le XVIIo siècle où les disciples de Terpsichore étaient, plus encore que les comédiens, obligés de vivre en marge de la société.
Le romantisme et Théophile Gautier firent de la ballerine une étoile, une cristallisation légère de la musique, un être supraterrestre, immatériel, presque mythique, qu'on ne pouvait évoquer sans un luxe de métaphores et d'entrechats littéraires. Le danseur, lui, était alors réduit à un simple rôle de satellite obscur, et il dut attendre l'arrivée de Diaghilew pour trouver un éclat comparable à celui de sa partenaire. Ainsi, peu à peu, les grands serviteurs de la danse entraient-ils dans le cœur du public que divas et ténors du théâtre lyrique encombraient encore.
Mais sait-on la dépense de travail, de volonté, d'intelligence, de sensibilité que réclament un simple fouetté, un balonné harmonieux, une cabriole réussie ? La danse engendre les mêmes émotions que les arts plastiques ; elle fait aimer par surcroît « le mouvement qui déplace les lignes ».
Danseurs et danseuses forment aujourd'hui l'aristocratie du monde théâtral ; leur histoire se situe aux confins de la réalité et de la féerie ; elle est une grande leçon de noblesse, de ferveur et de poésie.